• "Doit prendre confiance en soi"

    Ah oui, merci, au bout de cinquante fois, je ne l'avais pas compris.

     

    Bon, dans cet article, je vais un peu parler de mes stages.
    Il faut savoir que dans ma formation, on a énormément de stages (de trois semaines chacun, et on tourne dans différents services), où l'on a pas vraiment de professionnel référent pour nous encadrer sur la durée du stage (il arrive que parfois, on enchaîne plusieurs gardes avec la même personne, mais c'est rarement plus de deux gardes). Et à la fin de chaque journée (ou nuit), on doit faire une feuille de garde, qui récapitule notre journée et nous permettra ensuite d'être évaluée sur l'ensemble du stage.

    Du coup, de façon particulièrement liée à mes difficultés sociales, ce système est très compliqué pour moi (mais c'est même d'ailleurs aussi compliqué pour des personnes qui sont plus à l'aise que moi). Je dois chaque jour m'habituer à un nouveau professionnel, à son regard, à  son jugement, son encadrement (parce que clairement, il y a en a qui ne veulent pas d'étudiants, et qui le montrent bien) ...
    Heureusement, dans la relation avec les patientes, ça ne pose pas trop de soucis (sûrement car je suis dans un rôle de soignante, pas vraiment la "moi" de tous les jours).

    Et chaque jour, en fin de garde, lorsque je fais remplir la fameuse feuille, je me retrouve avec le même commentaire. Tu l'auras compris, il s'agit de "doit prendre confiance en soi". Peu importe que que ma garde se soit bien passé ou non, c'est systématique. Et ça commence à m'énerver un peu.
    Parce que récapitulons, j'en suis déjà à trois stages cette année (avec en plus d'autres stages les années précédentes), alors c'est bon, j'ai compris qu'il fallait que je me fasse confiance.
    Mais putain que c'est compliqué. Comme si l'on pouvait claquer des doigts, et, du jour au lendemain, assumer pleinement qui on est.

    Le plus terrible dans tout ça, c'est que je me connais, et je sais que depuis septembre, j'ai déjà fait d'énormes progrès. Mais ça, qui peut vraiment le savoir ? Parce que puisque je vois de nouveaux professionnels chaque jour, ils n'ont pas la moindre idée de qui je suis, de tout ce que je prend sur moi pour oser demander, faire ... Mais mes efforts passent inaperçus, parce que je ne fais pas encore assez vis à vis de ce qu'on pourrait attendre de moi.
    Parce qu'il y a encore certains gestes techniques "simples", tels que poser un cathéter, que je n'arrive pas à faire parce que je n'ose pas, par peur de rater le geste, ou de faire mal à la patiente. Parce que bien souvent, je parle avec une toute petite voix diminuée par la timidité ...

    Et le problème, c'est qu'ensuite, quand les feuilles de garde (et leur fameux commentaire) remontent à la cadre du service, puis à mon enseignante référente, il n'y a que ça qui ressort, puisque ça revient systématiquement. Et du coup, j'a le droit à chaque fois à un petit entretien, pour me dire, il faut oser, machin, truc, bidule .. Et à nouveau, elles n'ont pas la moindre idée des progrès que j'ai pu faire, parce qu'elles ne me voient pas agir, elles voient simplement les commentaires écrits.
    Qu'est-ce que je peux en dire moi ? Oui c'est vrai, il faut que je prenne confiance en moi, parce que même si j'ai progressé, ce n'est réellement pas encore suffisant. J'en ai conscience de cela, sans avoir besoin de tout ces commentaires qui me le rabâchent sans cesse. J'ai conscience qu'en osant pas faire un geste technique, c'est là qu'on est le plus délétère.  Mais je veux juste qu'on arrête de me le dire. Qu'on arrête de me prendre à part, comme si j'étais une petite chose faible, pour me faire des pseudos-encouragements qui au final, ne servent qu'à me renvoyer à la tête mes difficultés sans me donner de réelles pistes pour progresser. Alors que soyons honnêtes, je n'ai clairement plus besoin qu'on me renvoie mon manque de confiance en moi à la tête, parce que je me le reproche déjà bien trop toute seule.

    Car au final, je n'en peux plus, parce qu'à force de me battre contre moi-même, avec parfois l'impression que c'est vain, je m'épuise. Parce que c'est 8 ou 10 heures de boulot, qui non seulement sont physiques, mais aussi mentales (parce qu'on est face à des êtres humains, qui ont leur histoire, qu'il faut partager pendant une vingtaine de minutes avant d'enchaîner sur une autre histoire, toute aussi prenante ...)(et parfois même à l'extrême opposé, de la mort à la vie en moins d'une heure, littéralement). Et moi, je me rajoute à cela le fait de me battre en permanence contre moi même, pour correspondre aux attentes du professionnel.

    J'adore mes études, vraiment, mais la situation m'empêche d'en profiter pleinement (sans parler du covid bien entendu). Ca me donne juste envie d'exercer (sauf que ce n'est pas pour tout de suite), pour relâcher cette pression (parce qu'actuellement, quand je suis en autonomie avec des patientes, ça se passe beaucoup mieux ; sauf que personne ne peut en témoigner). Mais avec mes difficultés actuelles, j'ai juste peur de ne pas y arriver. Qu'à force de ne pas oser, je finisse par prendre du retard au niveau de l'acquisition des gestes techniques, et que je me retrouve à devoir vivre une année d'étude supplémentaire, qui n'apportera que son lot vain de "doit prendre confiance en soi" supplémentaires ...

     

    Cet article est clairement un article coup de tête, publié dans le feu de l'action, parce que ça me fait du bien d'extérioriser tout ça. 

     

     

    Edit : Bon. Soyons honnêtes, je n'ai pas tenu. Apres 12h de publication, j'ai mis cet article hors ligne. Je ne me sentais pas légitime de me plaindre de ça.

    Je me disais "Il y a des gens qui ont des problèmes bien plus gros que ça" (rappelons le, je sortais d'un stage en consultation de suivi de grossesse, et même si dans l'idée commune, c'est quelque chose de magique, cela n'empêche pas certaines patientes d'avoir des vies très compliquées).

    En plus de cela, j'etais stressée (par le stage, par des difficultés d'organisation, par mes partiels à venir ...) et extrêmement fatiguée.

    Cela n'empêche rien. J'ai le droit de me sentir mal par rapport à cela. Et il ne faut pas que je "dévalorise" cette forme de souffrance. 

    Parce que oui, ca me fait du bien de l'exprimer. Alors je dois l'exprimer. Et pas me cacher en mettant ça hors ligne. Je me cache bien trop souvent, n'en rajoutons pas.


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